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10 octobre 1916 - Maurepas - L'emplacement de l'Eglise. M. Clémenceau déjeunant dans les ruines.

#45.1 

Les hommes au combat, sont comme tous les militaires, placés sous l'autorité de leurs chefs depuis ceux qui combattent à leurs côtés leurs sous-officiers, eux-mêmes aux ordres de la hiérarchie militaire jusqu'aux officiers supérieurs et les états-majors qui, eux-aussi doivent composer avec le pouvoir politique. A mesure que s'élèvent les échelons de la chaîne de commandement, la guerre inévitablement s'appréhende de manière de plus en plus lointaine et de moins en moins incarnée. Cette distance entre les officiers supérieurs et la troupe sera reprochée à de grands généraux comme Nivelle, ou Joffre suite à l'échec d'opérations hasardeuses dont ils avaient été les initiateurs et dont le bilan humain fut désastreux.  Et on accorda alors, comme qualité, à Pétain sa proximité avec les soldats. Si la grande faucheuse épargna les militaires de haut rang et les gouvernants, elle ne fit pas la différence, sur le terrain, entre un fils de cantonnier et celui d'un général étoilé. Ainsi, le général de Castelnau ou Paul Doumer, futur président de la république, perdirent trois fils « au feu ».

Mais, s'il y eut un dirigeant préoccupé des conditions de vie des soldats, ce fut Georges Clémenceau, « le tigre ». En tant que président de la commission sénatoriale de l'armée, puis comme président du conseil, au cours d’innombrables visites au front, sans casque, les pieds dans la boue, là où les généraux n'allaient pas, se souciant sans relâche du moral du poilu, il conforta la détermination des soldats à se battre pour la patrie. A partir de novembre 1917, avec son tempérament bouillant, Clemenceau, l'intraitable releva une situation qui paraissait bien compromise et mérita son célèbre surnom de « Père la Victoire ».

Fin 1918, alors que l'armée allemande reculait partout au prix de combats meurtriers, il répondit favorablement à une demande d'armistice. Les nationalistes à qui la victoire proche avaient redonné des ailes,  voulaient pousser plus loin l'avantage « jusqu'à Berlin » et le renommèrent « Perd la Victoire » . Cette décision lucide a mis fin à une tuerie qui n'avait que trop duré ; elle a sauvé d'une mort plus inutile encore des milliers d'hommes dans chaque camps.

Sur cette photo, Georges Clemenceau et son fils Michel, capitaine au 6ième corps de l'armée coloniale, pique-niquent sommairement installés sur les ruines d'une église lors de l'une de ses visites sur le front.

27 juin 1918 - Paris - Ministère de la guerre. Le Colonel Girod et des officiers. Au fond les drapeaux de l'aviation et de l'aérostation.

#45.2

Redonnons également toute leur place aux sous-officiers assurant le commandement direct des hommes au front. Ils furent au final plus exposés que leurs hommes, leur taux de mortalité est plus élévé (22%) que pour l'ensemble des soldats engagés (18%). Ceux sont eux qui donnent le coup de sifflet qui déclenche l'assaut, eux qui s'élancent en tête à la sortie des tranchées, eux qui désignent des volontaires pour des missions qu'ils savent dangereuses, eux qui recensent les morts et les blessés, eux qui écrivent aux familles de ceux qui ne reviendront pas, c'est entre leurs mains que repose la vie de leurs compagnons, eux qui exécutent des ordres qu'ils ne comprennent pas toujours,  eux qui se doivent de montrer l'exemple …

Sur cette photo sont regroupés autour du premier chef de l'aviation française, le colonel Girod, des lieutenants, sous-lieutenant, adjudants …qui, avant de se retrouver au ministère de la guerre dans des uniformes impeccables avec des bottes trop brillantes avaient été pilotes ou mitrailleurs.

Peut-être, au pied du drapeau tricolore, avaient-ils été galvanisés par le discours de leur chef :

« [...] Levez vos fronts vers ses couleurs. Élevez vos âmes jusqu’à ses gloires. Haussez vos cœurs à ses espoirs, et voyez luire, à travers ses plis glorieux, la victoire de nos armes. Des ciels bleus de l’Alsace reconquise jusqu’aux bois verdoyants de Lorraine et d’Argonne ; depuis le Grand-Couronné, toujours altier, jusqu’aux rives sanglantes de l’Yser ; par-dessus les héroïsmes de Verdun jusqu’à nos tombeaux de Champagne et d’Artois [...] Soldats de toutes armes et de tout âge, qui communiez ici dans le serment au devoir ; chevronnés et briscards, recrues et bleuets, moustaches grises et fronts d’enfants, tous animés de la foi vive, élevez vos âmes vers notre emblème, pensez à nos morts, pensez à nos foyers, et jurez, à jamais, de venger les uns, de défendre et de libérer les autres ! […] » Il fallait bien cela pour consentir aux sacrifices, et à l'oubli de soi que vous impose la guerre.  

Photos - Albums Valois -  Bibliothèque de Documentation internationale contemporaine (BDIC)