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27 novembre 1916 - Guillemont - Un coin du Village. Troupes anglaises descendant des premières lignes.

#13.1

Les registres des archives du bureau central météorologique de France met en évidence que les années 1915 et 1916 comptèrent parmi les années les plus pluvieuses depuis 1877.

Blaise Cendras, citoyen suisse, engagé volontaire en 1914,  fut incorporé dans la légion étrangère en 1915 et naturalisé Français en 1916. Blessé, amputé du bras droit, il rapporte sans concession dans son livre « la main coupée » son expérience de la guerre. Dans l'un de ces nombreux journaux de tranchées écrits et lus par les combattants eux-même, il écrit: « Ce simple mot, pluie, qui ne signifie rien pour un civil ayant un toit au-dessus de la tête, contient à lui seul toute l’horreur pour un soldat sur le champ de bataille ». 

En effet, ni le vent, ni la pluie, ni la grêle, ni la nuit, n'arrête la guerre. Et la guerre a besoin d'hommes, alors les hommes vont en guerre par des chemins qui n'en sont plus, traversant des paysages qui ne sont plus que désolation.

Comme en témoigne cette photo, sous un ciel hostile, contre les éléments coalisés, ces soldats Anglais avancent résolument au milieu d'arbres déchiquetés, croissant des amas de ruines, des carcasses de chariots abandonnés … 

Ils allaient lents et lourds, épaules dévalantes et d'un pied sur l'autre la fatigue les hochait » écrit Jean Bernier dans « La Percée »

Dans « Les Suppliciés-Histoire vécue », René Naegelen, un autre ancien combattant, les voient ainsi : « Ce n'est plus une formation militaire, c'est une caravane lamentable qui traîne sa grande misère. Une pluie fine tombe, alourdissant encore les vêtements, les sacs et les musettes. »

La guerre, de tous temps, en tous lieux, entraine ceux qui la font ou qui la subissent, vers des régions où sont exacerbées toutes les souffrances de l'âme et du corps. Lors d'une autre guerre, plus proche mais plus loin de nous, Michael Cimino en parlait comme d' un « voyage au bout de l'enfer ».    

3 novembre 1916 - Somme - Boyau boueux. Signaleur d'artillerie gagnant son poste.

#13.2

L'eau qui tombe, mêlée au feu, sur les champs de bataille, ne les irrigue plus … Elle transforme la terre en boue, les tranchées en cloaque, les trous d'obus en pièges mortels, la soupe froide en rata gluant,  la capote et les couvertures en éponges puantes rongés d'humidité…

Le poilu a dans son havresac réglementaire un nécessaire de couture mais rien pour se protéger efficacement de la pluie !

Louis Barthas dans ses carnets écrit: « Le 18 avril [1916] à huit heures du matin nous quittâmes Villers-le-sec. Comme par dérision la pluie tombait à fortes averses ; chacun se protégeait comme il pouvait, la plupart nous avions des imperméables anglais que les Tommies nous avaient vendus ou échangés, d’autres mettaient un capuchon, une toile de tente. Tout à coup je crus avoir mal entendu ; on faisait passer l’ordre d’enlever les imperméables et cela au moment où la pluie redoublait. » au motif que ceux-ci n'étaient pas du bleu réglementaire.  

La boue est partout, elle s'oppose à tout mouvement; lorsqu'on y entre, il faut s'arracher à elle à chaque pas … La boue envahit tout, absorbe tout, les débris de materiel et les morts s'y fondent avec la terre. 

Et la boue se fait aussi meurtrière; malheur à l'homme ou la bête qui bascule dans l'une des mares visqueuses qui emplissent les trous d'obus. Sans aide, on s'y noie.

Jean Pales, du 24ième Régiment d’Infanterie Coloniale, écrivait : « on a pris l'habitude de vivre dans la terre avant d'être mort ! »

Photos - Albums Valois -  Bibliothèque de Documentation internationale contemporaine (BDIC)