#39.1
Au delà de l'enthousiasme qui accompagna l'arrivée sur le sol Français de troupes américaines, il y eut aussi vraisemblablement la surprise de voir parmi eux des régiments d'"afro-américains".
La situation des noirs américains en ce début de Xxième siècle était particulièrement dégradée dans le sud des états-unis où ils étaient encore majoritairement établis même si beaucoup migrèrent à cet époque vers le nord. Nombre d'entre-eux vivaient donc de fait dans un contexte ségrégationniste que l'on retrouvait dans l'armée américaine qu'une conscription fut mise en place. Les régiments n'étaient pas mixtes; et, à quelques exceptions près, les régiments de noirs américains furent affectés à des tâches secondaires: transport de troupes, ravitaillement, manutention, construction de camps ... Ils étaient généralement commandés par des officiers "blancs". Ce capitaine, dont le photographe a fait le portrait, est sans doute une exception comme son incroyable nom Napoléon Bonaparte. Étrange ! Le futur Napoléon 1er admirait certes Washington et aurait peut-être participé à la guerre d'indépendance des Américains contre les Anglais si celle-ci avait duré quelques mois de plus ! Mais le premier consul vendit la Louisiane à la jeune république Américaine et surtout rétablit l'esclavage dans les colonies où il préexistait avant 1789 !
Curieusement, la population française considéra assez différemment les noirs américains et les noirs coloniaux oubliant peut-être que les uns et les autres, s'ils n'avaient pas la même histoire, avaient pourtant la même origine !
Des unités de noirs américains furent engagés militairement. La plus célèbre de ces unités est le 369e régiment d’infanterie qui sera mis sous commandement « temporaire » de l’armée française, les officiers américains blancs refusant de les conduire au combat. "God Damn, let’s go !" hurlaient-ils au moment de sortir des tranchées pour se jeter dans la fureur des combats. Pendant plus de six mois, d’avril à novembre 1918, ces hommes se sont vaillamment battus. Surnommés "Men of Bronze" ou les "Harlem Hellfighters", leur unité a été décorée de la Croix de guerre Française et 171 d’entre eux ont reçu des citations à titre individuel. Ces soldats ne participèrent pas au défilé parisien de la victoire du 14 juillet 1919. L’état-major américain décida en effet de les rapatrier rapidement par peur des habitudes qu’ils auraient pu prendre d’une armée française qui ne pratiquait pas la ségrégation.
#39.2
D'autres soldats venus combattre dans nos campagnes d'Artois venaient de plus loin encore, de l'autre bout du monde: l'Australie, la nouvelle-Zélande, tout jeune état ou dominion du CommonWeath. Ils revenaient ainsi toucher la terre Européenne que leurs ancêtres avaient quitté quelques décennies auparavant comme colons britanniques avec aussi quelques Français ayant suivi le sillage des baleiniers des mers du sud !
Ces soldats océaniens sont reconnaissable à son célèbre chapeau appelé « Slouch Hat » dont le bord gauche est relevé . Les soldats australiens furent surnommé « digger » qui désigne là-bas un chercheur d'or. Ils remuèrent effectivement des tonnes de terre durant la guerre mais pour creuser des tranchées !
Sur cette photo, un groupe d'Australiens prend un peu de bon temps ; il faut chaud en cet été 1918, certains ont noué un mouchoir aux quatre coins pour se protéger du soleil, on joue aux cartes, un autre assis sur une barrique médite sur une bouteille de scotch, on a tombé la veste, relevé les manches, on souffle un peu … la guerre n'est pas loin !
On est là à Proyart , à moins de quarante kilomètres de Bullecourt, une petite commune rurale du Pas-de-Calais de moins de 500 âmes en 1914. Bullecourt est plus connue aux antipodes qu'en France et chaque année, elle reçoit des dizaines d'Australiens … Cette terre est presque une partie de l'Australie puisqu'ici, le sang Australien a coulé en abondance. Quatre divisions australiennes y furent engagées en avril et mai 1917; au soir de la première bataille, la 4ième brigade Australienne a perdu 2229 hommes sur 3000 hommes. Le lieutenant Barlow, écrit à sa femme avant d'être tué : J’espère que la guerre s’arrêtera bientôt, car elle détruit les hommes les meilleurs et tout ce qu’il y a de beau et de civilisé dans la vie ».
Photos - Albums Valois - Bibliothèque de Documentation internationale contemporaine (BDIC)